NATHALIE GENDRE – QUAND LA POÉSIE S’INVITE 6 octobre 2009

 Nathalie Gendre est permanente à ATD Quart Monde à Pierrelaye.
Elle relate l’expérience menée pendant 5 ans dans un canton rural de
Bretagne.
ATD y mène une action de colportage de livres au domicile de familles
isolées sans culture du livre.
Pour ce projet, 10 villages sont concernés, et 5 petites
bibliothèques.
Un gros travail en partenariat.

Il part du souhait exprimé par une maman : que nos enfants
rencontrent d’autres enfants. ATD propose un atelier d’écriture
ponctuel qui accroche bien. C’est ainsi que nait un projet plus
ambitieux dans la durée qui doit permettre une rencontre entre
enfants de différents milieux.
Le noyau de base est constitué des enfants connus dans le cadre du
colportage.

Il a fallu 2 mois de préparation pour trouver un financement et
organiser le transport.
2 animateurs : un écrivain financé par la DRAC, une volontaire d’ATD
pour le contact aux parents, la mobilisation des enfants et
l’écriture. « On a voulu que l’action soit visible, dans un lieu
public, une bibliothèque ». Cette bibliothèque est sous la
responsabilité de personnes bénévoles, sans formation.
Une sensibilisation par  affiches et un contact avec les écoles - un
peu méfiantes au départ. Concurrence ? Non occasion d’échanges entre
les instit et les parents, diffusion de tracts, puis mise en valeur
des textes produits par les enfants qui les lisent à l’école.

Garder tout au long du projet la porte ouverte. «  Moi, j’irai jamais
là dedans » (= la bibliothèque) dit Nolane. A vélo, il passe pour
aller au foot, il regarde par la fenêtre, puis demande à rentrer pour
voir… puis revient à chaque fois. Un garçon à cadrer tout doucement.
L’écrivain propose une démarche très ludique, à partir des 5 sens.
On s’assoie dans un champ et on écrit ce qui se passe, une
atmosphère. On a comme objectif un travail de qualité, qui soit beau.
Contact avec le prof d’art plastique du collège, et des gravures
seront réalisées avec un graveur professionnel.
Les enfants sont motivés et restent. Eva, « enfant repère » (c’est à
dire considérée comme prioritaire) n’a pas écrit une ligne de toute
la première année, elle met le bazar, n’a pas d’amis à l’école. Le
travail sur l’arbre l’a débloquée. Elle a lu son texte à propos du
cerisier de son jardin, rougeur… et reconnaissance à partir de ce
texte.

Un enfant dit « si on écrit, est-ce qu’on peut faire un vrai livre,
être des auteurs ? »

Rencontre d’un éditeur à la bibliothèque, avec les parents.
Puis on travaille sur une maquette, un titre, des textes, des
corrections, des illustrations. C’est un projet motivant. Les parents
donnent également leur avis. Mélanie est une enfant très seule, sa
famille habite dans une maison isolée avec une haie jusqu’au toit.
Une maison innommable, mais où il se passait des choses. L’animatrice
n’a pas pu y rentrer avant 2 ans. La confiance se crée et la porte va
s’ouvrir quand on travaille sur la maquette.
Le livre est  présenté à La Villette. Et il n’est pas question que
Mélanie participe au voyage. Le jour J elle est la première arrivée
à l’arrêt du car ! Bon travail de préparation avec elle qui présente
le livre à l’école. L’instit dit « on ne la reconnaît plus ». La
maman franchit la porte de l’école pour la première fois (sa fille
est en cm2). « Cette petite fille portait sur elle la misère,
personne ne voulait travailler avec elle. Le projet a permis une
rencontre qui change les relations entre les personnes ».

4 années d’atelier d’écriture
Démarche d’écriture après chaque animation
         ce qui se passe
         ce qui est décourageant et difficile
         les anecdotes.
         Comment le partenariat évolue.

Puis un travail d’évaluation financé par la DRAC : 18 mois
d’interview par un professeur de sociologie rurale, dans un soucis de
neutralité. Une stagiaire analyse les interviews et puis 6 mois pour
la mise en forme.
Cette évaluation est diffusée aux parents et aux partenaires.

Pour ATD le premier objectif est le mélange des publics. 50/50 une
mixité sociale. Et redécouvrir combien l’accès à la culture est
important. Offrir quelque chose qui change le quotidien, pour soi-
même ; Pour le groupe social.
Pour présenter le livre sur le canton on a organisé une fête à
laquelle 200 personnes participent. Beaucoup de monde s’est mobilisé
pour la déco. Nous avons donné une place à tous dans la préparation. 

Des rencontres un peu particulières entre des responsables et des
personnes avec lesquelles le courant ne passe pas. Et pouvoir parler
d’autre chose. Le maire a lu, l’instit a lu. L’art permet d’exprimer
des choses qu’ils ne peuvent pas dire. Les parents ont eu un regard
sur les capacités de leurs enfants et beaucoup de fierté. Il y a eu
un changement de comportement dans le village. De génération en
génération des clichés très durs se transmettent. Des familles sont
cataloguées. Mobiliser les parents pour l’exposition, que le maire
vienne, et l’AS, que les uns et les autres se saluent que les parents
puissent parler du beau texte de leur enfant.
Sortir les gens des étiquettes dans les deux sens : « celui là je ne
peux pas le voir… » à propos du pharmacien. Constater ensemble
qu’écrire c’est difficile pour tout le monde.
Nathalie Gendre était à plein temps sur cette action, elle continuait
le colportage de livre avec certaines familles. Gagner la confiance
des parents est très long. Les enfants sentent qu’on respecte les
parents.

Et aujourd’hui ? Beaucoup d’enfants galèrent, ils n’ont pas continué
à écrire. Il faut trois génération pour intégrer une pratique
culturelle.
8 ans après, on re-questionne les enfants. Ce qu’ils ont vécu
ensemble reste fort. Ils ont créé un groupe jeunesse Quart Monde,
avec le soucis que les plus éloignés soient là. C’est comme un
passeport, un truc dont on peut reparler. Ca a transformé leur
manière de faire des études et le choix des études. 120 enfants ont
participé : 30 par an (=2 groupes de 15 tous les 15 jours) +
vacances. Ca a été un tremplin vers d’autres activités. Une troupe
de théâtre pour quelques enfants et des parents. Et au collège, ils
s’inscrivent aux activités du mercredi ou au sport.
Au début les familles ne savent pas qui on est. Quand je dis : le
CCAS va nous aider, elles balisent, est-ce que je ne vais pas
raconter des choses ; faire ensemble les démarches.
Pour les enseignants, ouverture à la souplesse dans les horaires. On
arrive pas à engager une structure mais des personnes. Les enfants
voient que la maîtresse et la bibliothécaire se connaissent,
traversent la rue pour se dire bonjour.
Pendant le voyage à Paris, les enfants ont manqué l’école.

Pas d’action pérenne, mais un tremplin vers ce que la ville propose.
Et ne pas attendre que les gens viennent.
Aller vers eux. Dire nos objectifs
Faire le tour des acteurs du quartier.
Enfants repères, familles repères : quels sont ceux sur lesquels
mettre le paquet.
Bien choisir les moments de rencontre avec les parents. ATD permet
le rassemblement des adultes à partir des enfants. Un objectif qui
favorise le mieux vivre ensemble dans le quartier. C’est ce que les
gens expriment lors des temps forts.

Notes prises par Jeanne Vilbert
Atelier du 14

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