Lecture publique et grande pauvreté

17 Octobre 2008

Les Champs Libres Rennes

Bibliothèques et publics en situation de précarité

I – Restitution de trois co-formations ATD- Bibliothèques de Rennes

« Croiser les savoirs pour que tous aient accès à la culture »

A – Un travail sur les mots « Pauvreté, Livre » et les représentations des militants Quart Monde et des bibliothécaires. Analyse des différences et des (rares) ressemblances.(voir document joint PDF).

B – Ecrit d’un récit d’expérience d’un fait brut, sans jugement d’une situation vécue.

C – Analyse sous l’angle des logiques du professionnel et de l’habitant.

D – Voici résumées, les conditions qui favorisent la relation entre les personnes avec le livre :

1 – Etre à l’écoute
• Etre attentif aux difficultés de la personne : respect de la personne pour ne pas la rabaisser.

  • •croire dans les capacités des personnes en prenant conscience des risques qu’elles prennent en venant à la bibliothèque
  • •ne pas porter de jugement, ne pas avoir de préjugés, changer le regard,
  • •travailler sur une connaissance mutuelle dans le respect de la vie privée, s’intéresser, se préoccuper de la personne,
  • •être disponible pour accueillir tous les publics.

2 – Favoriser la relation avec le livre

• Faire des actions à l’extérieur de la bibliothèque (bibliothèque de rue…hors les murs, donner envie, faire venir à la bibliothèque)

  • •Créer des occasions de dialogue,
  • •Etre attentif à des attitudes
  • •Créer des accompagnements pour ceux qui n’osent pas entrer dans les bibliothèques, encourager des démarches de groupe.

3 – Favoriser des partenariats

  • •Trouver des partenaires qui peuvent accompagner via des activités à la bibliothèque
  • •Trouver un relais pour contacter la famille,
  • •Créer des passerelles entre les institutions et les habitants.

4 – Proposer un accueil personnalisé et créer des conditions d’autonomie

  • •Etre vigilant au moment de l’accueil surtout la première fois, faire visiter
  • •Accompagner physiquement la demande
  • •Adapter le vocabulaire, moins de termes professionnels
  • •Vérifier que la réponse correspond à la demande (faire reformuler la demande).

BDIV – Rennes Métropole   ATD Quart Monde

Droit à la culture pour tous

Quels sont les freins liés à la pratique du métier de bibliothécaire ?

Plusieurs expériences ont été relatées :

Nathalie Gendre, volontaire à ATD dans un canton rural : Des enfants se rencontrent par la poésie.

Avec des enfants de tous milieux ; un atelier gratuit, à la bibliothèque.

Suite à un projet de colportage de livres prise de conscience de la solitude et de l’isolement des enfants. Une femme dit : « que mes enfants rencontrent d’autres enfants ». Permettre une amitié qui puisse rejaillir sur la vie quotidienne.

Avec un écrivain pro, avec l’atelier gravure du collège et l’expérience du prof d’art plastique.

Aller rencontrer chaque enfant un par un à la maison ou dans la cour de l’école ; souvent il dit son peu d’intérêt, ne dit pas sa peur. Inutile de faire des tracts.

Expliquer que ça n’est pas comme l’école, tu viens avec qui tu veux, viens voir sans t’engager.

Résoudre le problème du transport.

Laisser du temps : « je rentre pas » dit une fille, Maryse venue en vélo. Au bout de deux ans, elle est mordue assidue.

Laisser le calme s’installer peu à peu cad accepter l’enfant galipettes.

Deux beaux livres sont édités. Une fierté collective qui rejaillit sur les familles, les communes.

Même si la rencontre entre les enfants n’est pas simple. Ils ont en commun un énorme respect de ce qu’a écrit l’autre. Maryse, toujours toute seule dans son coin, un jour veut lire son texte. Dans l’heure qui suit, les autres enfants se sont intéressés à elle. Une fille joue avec elle à l’école.

Ecrire n’est pas une question de savoir écrire. Laisser du temps, créer des relations individuelles, créer du beau, dans une ambiance de calme et de respect, et puis durer des années…

Isabelle Caniot, bibliothécaire à Lille

En 1992 la médiathèque contribue à la première formation de médiateurs du livre en partenariat avec ATD. Il s’agit de rendre plus accessibles l’institution bibliothèque. Début d’un intérêt pour ce qui se passe à l’extérieur. Pas toujours compris par les collègues : ils vont se promener, nous on travaille !

Le fait d’exprimer les objectifs amènent d’autres partenaires à se manifester : des PMI, et des centres sociaux. Ce travail avec les partenaires est essentiel pour diversifier les publics. Maintenant on est invité l’été pour notre jardin de lecture. 2003, c’est la fin des Emploi-Jeunes, les médiateurs sont intégrés dans le personnel.

Isabelle présente deux actions particulières. Avec les bébés du cœur. Les parents envoient leurs enfants. Ils veulent qu’on leur apprenne le français ou bien à lire… Quelques fois les parents lisent. Toujours à deux pour animer.

Et la bibliothèque dans la rue. On retravaille la caisse à chaque fois. A la fois des anciens que les enfants aiment à retrouver et des nouveaux.

L’impacte chiffré sur les emprunts à la bibliothèque est difficile à évaluer. Souvent ces enfants gènent dans la médiathèque.

Importance de la relation et de la proximité. Des bénévoles participent et sont associés aux réunions de réflexion.

Les médiateurs du livre ont aussi des fonction dans la médiathèque, c’est important pour la cohésion de l’équipe.

A Brest on parle de Bibliothèque de plein air « on est pas à la rue ».

La fréquence et la régularité sont essentiels

Abdel Wahid Allouche Médiathèque d’Arcueil.

Quels sont les obstacles au droit à la culture dans les bibliothèques ?

1 – Certains obstacles sont exogènes, cad indépendants de notre volonté citoyenne.

• Conception institutionnelle de reconversion de tout le monde à l’œuvre de qualité, y compris les classes populaires. cf Malraux, conception élitiste ?

• Démocratie de droit ne va pas très loin au delà des déclarations de principe. Le capital culturel revient au capital culturel.

• La politique du reste 1% Alors que la demande exprimée avec les médiateurs du livre n’est pas reprise dans une politique formalisée.

2 – Certains obstacles sont endogènes

• Une conception du métier basée sur l’unité des collections et l’unité des publics est inefficace. Le bibliothécaire serait un technicien de l’ombre prescrivant à un public moyen par anticipation une offre valable pour tous.

Lire serait une question de volonté individuelle. Or tout le monde n’a pas les mêmes chances et beaucoup est joué avant 6 ans… Notion de passeur orientateur.

• Le bilan de la démocratie culturelle montre un recul ou une stagnation.

Dématérialisation des matériaux : On ne contrôle plus les collections.

En visant un public moyen, il se produit un décalage avec les publics. Les livres ne sont pas consultés. 17,8% de la population fréquentent ces établissements qui coûtent très cher à la collectivité.

La demande des absent n’est pas exprimée.

La manière de classer rebute

La façon d’accueillir derrière un guichet également.

Le langage est technique.

Les projets sont plutôt dirigés vers les classes moyennes.

• La réduction des missions de documentation. Intégrer les missions d’éducation populaire, de formation à l’écrit dans le projet du service. Sinon les expériences disparaissent en même temps que ceux qui les ont portées.

• Absence de politique d’accompagnement et d’accueil qualité. On attend les gens, sortir d’une conception auto-centrée. Sortir de la bibliothèque pour toucher des publics potentiels. Appréhender la conception du livre médiation avec des publics.

• Les propositions, les expérimentations.

Prendre les moyens pour associer les partenaires au choix de livre acquis.

Sortir de la politique du reste en intégrant dans les moyens du service. Pour une discrimination positive corrigeant les handicaps culturels.

Sortir les livres quand il fait beau ne veut rien dire. Il ne s’agit pas de dire « la bibliothèque existe, puisque ces personnes rencontrées dehors ne vont pas y aller ».  Il faut une bibliothèque dehors régulièrement et en permanence. Dans les salons de coiffure, au marché, dans les salles d’attente…

• Sortir des actions isolées et ponctuelles sans partenaires.

• sortir de l’autosuffisance institutionnelle

« Ca me parle, je sais ce que ça peut apporter d’avoir des gens qui viennent partager » conclue une très ancienne bénéficiaire de bibliothèque de rue.

Notes de Jeanne Vilbert

17 Octobre 2008

Les Champs Libres Rennes

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